Il y a dans la vie les plaisirs régressifs, donc, j’en ai déjà parlé.
Et puis il y a les plaisirs coupables, les trucs dont on a un peu honte, les trucs qui ne se font pas trop, mais qui sont simplement… kiffants ! Les deux sont souvent liés (regarder les mystères de l’amour à 30 ans par exemple, religieusement, tous les samedis ET dimanche), mais certains sont surtout coupables.
Il y en a un que j’aime en particulier. C’est la « libre antenne ».
Rollback in time : nous sommes en 1995, Lovin'fun avec Doc &Difool
anime les débuts de soirée de Fun Radio. Max prend le relais à partir de 22h.
C’est la grande grande époque des DJs radios, les animateurs stars (et le star system de Max justement), les
programmes du soir sont plus que des Rendez-Vous, il s’agit de phénomènes.
Je ne manque pas à l’appel, j’ai à peine plus de 10 ans, et
tous les soirs je m’endors avec Fun Radio (qui à l’époque, en plus, à le bon
goût de passer de la vraie musique et de mettre en avant Oasis, Blur, Fool's
Garden).
Jusqu'à il y a peu, quand on me parlait de libre antenne, je pensais à cette époque.
Mais ça, c'était avant...
Plus de 15 ans plus tard, je suis dans ma salle de bain, et
je réalise que ça me manque de ne pas y avoir la radio. Elle est présente chez
mes parents, et j’aime bien, quand j'y retourne, ça me rappel l’heure qu’il est quand je me prépare, ça me fait un bruit de fond, et puis au passage je récupère quelques
news via les infos. Chez mes parents c’est Europe 1 qui est (et était, quand j'étais minus) écoutée
dans les pièces communes (la radio de la salle de bain, donc, ou celle dans la cuisine, le matin, pendant ce
simulacre de moment partagé autour du petit déjeuner où tout le monde prenait
grand soin de s’en dire le moins possible – pas trop du matin dans ma famille).
Europe 1 c’est la radio de maman,
celle qu’on retrouvait dans sa voiture. RTL2 celle de mon papa. Celle qu’on
retrouvait dans sa voiture. Papa avait peut être la plus belle voiture, mais pour les radios à priori...
Europe 1 donc, logiquement, comme par habitude c’est elle
que j’ai programmé dans ma "radio de salle de bain" pour rythmer mes moments au radar du matin.
Et puis un soir...
Alors que j’étais
en train de me perdre dans l’espace-temps salle de bain....
Particulièrement le soir, j’ai cette tendance à pouvoir rester un temps de
dingo devant mon miroir pour RIEN. Mais vraiment : RIEN. Genre j’y
rentre à un moment M, et 1h30 plus tard je ressors en me disant que je me suis
juste lavée les dents. C’est un mystère un peu perturbant et ainsi pour le
dompter, je me suis dit un soir que je pouvais AUSSI allumer ma radio de salle
de bain avant d’aller faire dodo. Et c’est ainsi, que, sur Europe1, j’ai
découvert… La libre antenne de Caroline Dublanche.
Le concept : entre 23h et 1h du matin, du dimanche au
jeudi (le vendredi c’est pareil, mais avec Sophie Péters à la place de Caroline
Dublanche), des gens appellent une dame qu’ils ne connaissent pas mais
« j’vous écoute depuis tellement longtemps, je me suis décidé(e) à vous
appeler », et parlent de leurs histoires. C’est rarement drôle. Parfois je
me dis même que certains ont VRAIMENT des vies de merde (plaisir coupable = je juge = je suis supérieure). D’autres jours je me
dis qu'y en a qui se posent trop de questions. Et au départ je me disais
surtout : « Mais qu’est ce que c’est que ce truc ? ». Et
puis c’est insidieux. On commence par mettre la radio en fond sonore. Au bout
de quelques minutes on se surprend à écouter, à arrêter ce qu’on était en train
de faire pour en savoir plus, comme une maladive curiosité d’entendre les
malheurs de cette grand-mère qui ne s’entend pas avec sa belle fille et qui ne
voit plus ses petits-enfants, de cet homme qui ne comprend pas pourquoi il s’est
fait larguer (elle lui avait dit que c’était juste l’histoire d’une nuit mais lui avait préparé un bol de corn flakes le lendemain, ça devait vouloir dire un
truc quand même)…
Et puis petit à petit, c’est devenu une habitude en plus, au point
de faire partie de mes rituels du coucher (oui, j’ai 3 ans). Je vais dans la
salle de bain, j’allume la radio, je rythme ainsi ma session « belle au
naturel » (genre) en sachant très bien que si le flash de minuit déboule
avant que je ne sois couchée, je vais être crevée le lendemain. Je finis par
éteindre, je rejoins mon lit (un jour je ferai un poste sur l’amour que je voue
à ce moment juste avant d’aller se coucher, un amour sans borne ni limite). Selon l’humeur, l’envie, le livre sur ma table de chevet, je bouquine radio
éteinte (IMPOSSIBLE de lire avec Caroline Dublanche) et quand mes yeux se ferment, c’est d’un même geste que je pousse
mon livre, éteins la lumière et rallume la radio. Je me berce sur ces histoires
improbables et cette façon qu’a Caroline d’en envoyer bouler certains, ou
mieux, de leur dire à 23h59 et 30 secondes, et alors qu’ils blablatent sur leur
histoire depuis 10 minutes « on va se quitter Jean-Luc (oui, pas d’bol),
c’est l’heure du journal. Bon courage ! Au revoir ».
C’est un voyeurisme bizarre, un moment un peu à part. Un
truc rien qu’à moi… Mais quand je n'suis pas chez moi, ou que je rejoins mon lit beaucoup trop tard, ça me manque.
J’dors pas pareil.
xxx
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