dimanche 16 février 2014

Homesick (part III... épisode 1 - ça n'en finit plus cette histoire)

On a parlé du départ, de l'avant, des raisons de partir.
On a parlé du pendant, de l'histoire, des paysages.
Alors qu'est ce qu'il reste à en dire ?

(Commence ici l'article où je partage ma sagesse et fais genre "JE SAIS" sur base d'histoire de rien*... 
Alors prépare toi petit Padawan)

* les histoires de rien : histoires en mode 3615 ma vie où je raconte des trucs super passionnants fondés sur mon quotidien.

"Ceux qui pensent qu'ils connaissent tout sont fatigants pour ceux d'entre nous qui avons réellement le savoir." 
Oxford st, Sydney (photo de qualité discutable j'en conviens)
En Australie j'ai appris. 

L'indépendance financière d'abord. Je payais mon loyer par moi même, moi toute seule, pour la première fois. Je ne devais de compte à personne, et salaire au black oblige, pas même à un banquier. J'étais fauchée mais c'était ma faucherie. Chaque dollar économisé servait à mes projets, personne n'avait rien à y re-dire.
Si l'argent ne fait pas le bonheur, être maître de ses choix et  ne se sentir redevable de personne (aussi bien attentionnées et discrètes que puissent être les âmes généreuses qui m'avaient financées jusqu'alors) est, je l'ai compris, le point de départ essentiel à mon équilibre.

Les tongs au pied du "sapin"
X-Mas à Sydney
Photo floue
La vie en collocation. Outre l'impossibilité de me balader à poils dans mon salon et les économies qu'elle permet, le principe de colloc est fondé sur le respect de la vie privée de l'autre et la propreté des parties communes. Je suis bien tombée. Il y a bien-sur eu quelques explications, des moments de moins bien, mais je garde surtout beaucoup de moments de partage, et des présences qui, si parfois peuvent être pesantes, ont l'avantage d'être rassurantes à 17 000 km de sa famille (de sang, de cœur). Ma pudeur relative a rapidement permis à mes collocs de bénéficier de mes mini shorts et petits pyjamas, laissant à ce grand australien qui dormait dans la chambre d'à côté la possibilité de m'appeler affectueusement sexy bum. Pas de sous-entendu, il a depuis fait un enfant avec la française qui partageait déjà sa vie et corrigeait sa grammaire comme lui corrigeait la notre. Cette maison était un mix franco-anglais-australien, au rythme des visites, des apéros, des dîners.
Mon caractère indépendant et mon besoin de solitude, je l'exerçais en découchant parfois, sans prévenir, en marchant des heures dans la ville et en rejoignant le pacifique, part entière de ma vie à Sydney... Et puis, 6 semaines toute seule toute seule sur les routes par la suite, ça permet de se retrouver seule avec soit-même.

Tamarama Beach, juste à côté de l'énorme Bondi - Sydney

Harbour Bridge - Sydney










L'anglais. Mes premiers pas australiens étaient assez approximatifs en la matière. Mais petit à petit, à force de lire des romans en anglais uniquement, à force d'écouter mon colloc (donc) corriger des accords désastreux, à force d'emprunter des bouquins de grammaire niveau primaire à la bibliothèque, j'ai pu communiquer. Comprendre et se faire comprendre : les premiers pas, incontournables, vers l'intégration. Ceci étant dit la vraie bonne façon d'apprendre une langue étrangère... C'est de tomber amoureuse d'un garçon qui ne parle pas un mot de votre langue maternelle. Ça force à aller plus loin et à masteriser la dernière étape de l'apprentissage : les conversations téléphoniques. Rien de plus dur que de comprendre quelqu'un sans le voir. Rien de plus dur que se faire comprendre sans langage corporel comme assistant.
L'australien est un anglais un peu à la one again : les abréviations sont légions, certains mots sont empruntés aux langages aborigènes. Et comme dans toute culture certaines expressions sont utilisées 100 fois par jour comme des ponctuations, des respirations, des virgules :

- no worries (pour tout et n'importe quoi "pas de problème" pour de rien, aucun souci, ça va le faire, par ce que d'une façon générale, en Australie... Y a pas de problème !),
- mate (pote, ami, mec que je viens de croiser dont je ne connais pas le nom, ma meuf, mon mec, bref toi, là, qui est en face de moi et à qui je parle, qui que tu sois),
- good onya (c'est bien, c'est cool, on est content pour toi),
- she'll be right (ça va le faire, encore une fois, par ce que, j'insiste, en Australie, ça va le faire...)

L'accent y est particulier : entre l'accent anglais pur et dur et celui du fond du Texas. Moins pire que les kiwis (néo-zélandais), les aussies (australiens) peuvent dérouter.
Bref, au bout de quelques mois j'avais bien remarqué que je ne faisais plus répéter les gens et qu'on me faisait, moi aussi, beaucoup moins répéter quand je parlais. Mais c'est en rentrant que j'ai su que je pouvais affirmer sans trop me vanter mon billinguisme. Je rentrais chez mes parents d'une soirée à ramasser des plateaux chez Flunch (trop trop chouette!). A cette époque je conduisais (c'était quelque jour avant d'en être vaccinée). J'étais donc en voiture, la radio allumée. J'avais alors la confiance au volant et je me suis mise à chanter... Pour de vrai. C'était Nathalie Imbruglia sur RTL2 (une australienne, la boucle est bouclée), elle chantait Torn, et les mots qui me venaient non seulement n'étaient pas en yaourt, mais faisaient du sens ! Le déclic s'était déjà fait sûrement plusieurs mois auparavant, mais c'est ce soir là (au détour d'une chanson à l’intérêt discutable lui aussi) que j'ai réalisé que mon cerveau pensait en anglais.
Blonde...
L'anglais est peut être l'héritage australien que j'utilise le plus fréquemment et régulièrement. Pas une journée sans que je ne parle, lise ou écoute en anglais. Depuis j'ai laissé un peu de côté l'in-formalisme de mon parler pour y ajouter quelques expressions proprettes du monde professionnel. Et issu d'un apprentissage pas toujours très conventionnel, je continue d'apprendre un peu tout le temps cette langue que je parle pas mal à l'intuition.

L'importance des langues, des mots. Au détour d'une conversation avec un aborigène dans le centre de l'Australie, j'ai compris quelque chose qui depuis me hante pas mal :
On estime qu'à l'arrivée des Britanniques sur le continent (1770), il existait au moins 250 langues en Australie, regroupées en 27 familles linguistiques et réparties en des centaines de dialectes. [...] Les langues qui sont encore largement parlées aujourd'hui et qui ne sont pas en voie de disparition immédiate sont au nombre de 30 environ. (Petit extrait Wikipédia qui va bien)
Depuis toujours les aborigènes transmettent une grande partie de leur savoir par la parole : les chansons, les poèmes, les histoires et légendes. Perdre des langues, les faire disparaître, c'est, concrètement, perdre du savoir.
Sans entrer dans un débat politique / économique / écologique sur la population aborigène en Australie, il est clair que d'une langue à l'autre, les tournures de phrase et le vocabulaire permettent d'exprimer des choses propres à une culture. Ma tête ayant appris à passer d'une langue à l'autre, j'ai parfois cette impression qu'il me faudrait les 2 pour exprimer clairement ce que je veux dire. Et trop souvent des traductions approximatives amènent de la confusion ou de mauvaises interprétations. L'anglais est plus imagé que le français, plus souple. L'importance des mots justes, l'héritage d'une langue, le reflet d'une culture et d'un savoir dans la richesse du vocabulaire : ils sont nombreux les profs qui me sont revenus en mémoire depuis.

xxx
 

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